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COE - Cikle et Fatmir : vivre la cooperation


From "Sheila Mesa" <smm@wcc-coe.org>
Date Thu, 30 Aug 2001 15:17:26 +0200

inter-ethnique en Macedoine

Conseil oecumenique des Eglises
Document COE, Feat-01-12
Pour publication immediate
Le 30 aout 2001

Cikle et Fatmir : vivre la cooperation inter-ethnique en
Macedoine

Antony Mahony

Tout le monde connait Aleksandar Krzalovski par son surnom,
.Cikle/, qui lui a ete donne pendant ses etudes a l'Ecole
superieure de Korchagin, a Skopje, qui forme les jeunes
mathematiciens particulierement doues. Ensuite, il a etudie
l'informatique et tout semblait le destiner a faire carriere dans
la technologie. Pourtant, il s'est dirige vers le Centre
macedonien pour la cooperation internationale (CMCI),
organisation interreligieuse dont il dirige actuellement le
programme d'aide d'urgence. Le CMCI a ete fonde en 1993 par le
Conseil oecumenique des Eglises (COE), avec l'appui de Dutch
InterChurch Aid, dans le but d'ameliorer les relations
inter-ethniques et d'encourager la paix grace au developpement. 

Comme tous ses contemporains, Cikle a vu s'operer de nombreux
changements dans son pays depuis que celui-ci est devenu
independant de l'ex-Yougoslavie il y a dix ans. Pour une fois
dans leur histoire, dit-il, les Macedoniens ont eu l'occasion de
gerer eux-memes leurs affaires plutot que d'etre soumis a
l'autorite de Belgrade ou, auparavant, de l'Empire ottoman. La
Yougoslavie communiste pronait la fraternite et l'unite, dans
l'idee de rassembler de nombreux groupes ethniques en une seule
societe multi-ethnique. Mais lorsque ce regime prit fin, dit
Cikle, on vit se manifester un sentiment accru de l'identite
ethnique. Dans la nouvelle Macedoine, les gens prirent plus
fortement conscience de leur identite ethnique, qu'ils soient
Macedoniens, Albanais ou membres d'une des nombreuses
minorites, tels les Valaques, les Roms ou les Turcs.  

Cikle se souvient que, dans sa classe, il n'y avait qu'un seul
eleve albanais sur 35, et il n'a guere eu de contacts avec les
Albanais avant de travailler pour le CMCI. Il admet que son
attitude a change: .Je suis devenu beaucoup plus tolerant apres
avoir passe cinq ans au CMCI, et la plupart de mes collegues
peuvent en dire autant./ En revanche, il remarque chez certains
de ses contemporains des signes de prejuges raciaux et de
xenophobie qu'ils ne manifestaient pas auparavant. Ce qui est
plus grave encore a ses yeux, c'est la pression exercee sur les
moderes par leur entourage pour les inciter a adopter des
positions extremistes. Selon Cikle, la nouvelle regle semble etre
de rejeter sur les autres la responsabilite d'avoir suscite la
crise: les Macedoniens accusent les Albanais qui, a leur tour,
accusent les Macedoniens. Cikle a le sentiment qu'il y a toujours
moins de place pour le dialogue entre les groupes ethniques, en
particulier depuis les explosions de violence de cette annee.  

Depuis huit ans, le CMCI a collabore en de nombreuses occasions
avec des communautes albanaises, notamment pour assurer
l'approvisionnement en eau des villages de la minorite dans le
nord et l'ouest du pays et pour lancer d'autres projets de
developpement communautaire ainsi que des programmes
generateurs de revenus pour la population. Cette experience
s'est revelee precieuse lorsqu'on a decide de travailler aussi au
Kosovo en 1999, apres la fin des bombardements de l'OTAN. Le CMCI
tenait beaucoup a ce qu'une organisation macedonienne soit active
au Kosovo, pour manifester l'engagement du pays voisin a venir en
aide a la population. Apres avoir installe un bureau a Djakovica,
le CMCI a commence a gagner la confiance des gens en leur
procurant ce dont ils avaient reellement besoin : des materiaux
de construction, de la nourriture. L'organisation a constate
qu'elle avait les capacites requises pour repondre aux exigences
d'un vaste programme humanitaire et que son personnel etait en
mesure d'assumer de nouvelles fonctions.  

Cikle fut appele a collaborer au nouveau programme pour le
Kosovo, ou il dut passer de longues heures au bureau. .Cikle, tu
te fonds dans l'environnement!/, lui declara l'un de ses
collegues. Le travail n'etait pas sans risques: au debut, le
bureau recut des telephones de menaces a la suite du licenciement
de certains membres du personnel et il fallut faire appel a la
mediation du maire. Cikle devait prendre des precautions pour
assurer sa securite: bien qu'il fut connu et apprecie des gens de
Djakovica, il n'osait pas parler sa langue en public, de peur
qu'on le prenne pour un Serbe, et il etait toujours accompagne
par un membre du personnel local. .Ma situation etait
particuliere du fait que j'etais le seul Macedonien
travaillant librement a Djakovica./  

C'est une tout autre voie qui a conduit Fatmir Bitiki au CMCI.
Il passa son enfance dans un quartier de Skopje macedonien a 90%,
mais sa famille etait en bons termes avec tous ses voisins.
Excellent eleve de l'ecole superieure de langue albanaise Zef
Lush Marku, a Skopje, il avait toujours reve d'entrer a
l'academie militaire de Yougoslavie. Normalement, ses
resultats scolaires auraient du lui permettre de le faire,
mais, bizarrement, l'occasion ne se presenta jamais. Apres avoir
termine l'ecole superieure en 1993, il decida d'entreprendre des
etudes de gestion, mais lorsqu'il voulut s'inscrire a
l'Universite de Skopje, il n'y avait plus de place. Que faire? Il
avait une chance de suivre un cours du meme genre a la Faculte de
gestion economique de l'Universite de Tirana, mais en allant en
Albanie, il perdait tout droit a recevoir une aide de l'Etat
macedonien. Finalement, son frere aine accepta de financer ses
etudes pendant quatre ans.  

Mais Fatmir continuait a rever d'une carriere militaire, suivant
en cela l'exemple d'autres membres de sa famille. Il esperait
avoir sa chance en 1997, annee ou il devait accomplir son service
militaire dans l'armee macedonienne. Mais la nouvelle Macedoine
n'avait plus d'academie militaire; celle-ci etait restee en
Serbie lors du demembrement de l'ex-Yougoslavie, et il ne lui
resta plus qu'a faire son service comme simple soldat.
L'experience fut instructive : .J'ai decouvert combien il est
dur pour un Albanais de servir dans l'armee. J'etais le seul de
mon groupe a avoir fait des etudes, mais cela ne m'a pas aide a
etre promu. Peut-etre n'etais-je pas fait pour l'armee, apres
tout./ Quoi qu'il en soit, son reve ne se realisa pas. 

En 1999, Fatmir dut donc reflechir a son avenir professionnel.
Le moment etait mal choisi pour trouver du travail en Macedoine,
en particulier parce que ses qualifications superieures n'etaient
pas reconnues par les employeurs locaux. Les perspectives etaient
peu encourageantes, mais soudain la chance tourna. Un ami lui
conseilla de se presenter au CMCI. .Le premier entretien me fit
decouvrir ce que les ONG faisaient dans le pays; j'ai constate
que  des gens de valeur y travaillaient./  

Il fut engage par le programme de developpement des ONG du CMCI a
titre de responsable de la formation et ne tarda pas a se
retrouver aux Pays-Bas pour suivre un cours de .formation des
formateurs/. Mais a peine sa carriere avait-elle debute que la
crise du Kosovo ient du pays voisin a venir en aieclata. En
octobre, Fatmir commenca a travailler pour le programme du CMCI
au Kosovo, ou il etait particulierement qualifie pour assurer les
contacts entre cette organisation et les ONG partenaires locales.
.Pour moi, c'etait un defi. Je connaissais les gens et leur
culture, et je pensais que ce serait facile./ Mais les choses
avaient change pour les gens qui avaient du fuir leur pays, puis
y etaient revenus. Une attitude nouvelle, plus dure, plus
intolerante dominait : .Avant, il etait normal d'entendre
parler le macedonien ou le serbe, mais ce n'est plus le cas./  

Cette annee, l'evolution de la situation politique en Macedoine
a place le CMCI devant de nouveaux defis. Il etait parfois
penible pour Fatmir d'entendre ses collegues, avec qui il
avait d'excellentes relations de travail, parler des troubles
inter-ethniques en termes violents. Son opinion differait de la
leur, mais il n'osait pas l'affirmer, craignant la reaction de
ses collegues. Le directeur, Saso Klekovski, estime que c'est a
lui et au personnel qu'il incombe de sauvegarder la paix au sein
de l'organisation : .La paix repose sur les rapports des gens
entre eux et non pas sur ce que decident les responsables
politiques. Je veux encourager les gens a s'exprimer, meme
lorsqu'ils sont en colere. Il faut que les autres sachent ce que
nous ressentons, meme si nos vues divergent. La tolerance, c'est
cela. Le silence ne fait que creuser les fosses qui nous
separent./ C'est pourquoi il a organise regulierement des
reunions d'information ou le personnel etait invite a evoquer
librement la situation politique. Ainsi, la cohesion du groupe et
la confiance mutuelle se sont renforcees au cours de cette
periode difficile.  

Les collegues doivent aussi s'entraider sur le plan pratique.
Certains collaborateurs macedoniens ont refuse de se rendre dans
des regions a majorite albanaise, craignant pour leur securite.
Quant a Fatmir, il ne s'est pas risque a Bitola ou, a la fin du
mois d'avril, des proprietes et des magasins albanais avaient ete
attaques et brules par une foule excitee. En revanche, il s'est
rendu a Probistip, ville macedonienne de l'est du pays, accompagne
par un collegue macedonien, pour une visite a une ONG locale. Il
ne met pas en doute la solidite de ses relations avec les
personnes et les organisations avec lesquelles il collabore,
quelle que soit leur origine ethnique. Mais dans la situation
actuelle, tout le monde est plus prudent qu'avant: .On ne sait
jamais qui va vous arreter sur la route/, declare-t-il.  

En ces temps difficiles ou les communautes sont dechirees par
des forces destructrices, n'importe quelle manifestation de
collaboration et de comprehension est un signe d'espoir. .Ce
n'est plus comme avant la guerre/, declare Cikle, .mais grace a
notre experience de la Macedoine et a notre diversite ethnique,
nous pouvons montrer que la cooperation est possible./
Travaillant pour le bien de la communaute et au service de la
paix, Cikle et Fatmir accomplissent en Macedoine ce que pronent
tous les mediateurs internationaux et les milieux politiques
locaux: ils vivent la cooperation inter-ethnique en Macedoine.  
_________________
Antony Mahony a travaille comme conseiller interimaire aupres du
SEEP (Partenariat oecumenique pour l'Europe du Sud-Est),
programme lance en 2000 par le COE. Ce programme s'efforce de
resserrer la cooperation entre les Eglises, les organisations qui
leur sont liees et d'autres partenaires, en vue de promouvoir la
paix, la justice et le developpement economique dans la region.
Le CMCI est le principal partenaire du COE en Republique de
Macedoine, et inclut dans son travail toutes les communautes
religieuses et ethniques du pays. Les termes "Macedoine" et
"macedonien" designent l'Etat et la population de
l'ex-Republique yougoslave de Macedoine et n'impliquent aucune
prise de position officielle de la part du COE.  

Vous pouvez commander les photos accompagnant ce Document COE en
adressant votre demande a Catherine Alt, courrier electronique:
crd@wcc-coe.org   tel:  (+41.22) 791.62.95.

Pour obtenir de plus amples informations, veuillez vous adresser
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**********
Le Conseil oecumenique des Eglises (COE) est une communaute de
342 Eglises. Elles sont reparties dans plus de 100 pays sur tous
les continents et representent pratiquement toutes les traditions
chretiennes. L'Eglise catholique romaine n'est pas membre mais
elle collabore activement avec le COE. La plus haute instance
dirigeante du COE est l'Assemblee, qui se reunit environ tous les
7 ans. Le COE a ete forme officiellement en 1948 a Amsterdam, aux
Pays-Bas. Le secretaire general Konrad Raiser, de l'Eglise
evangelique d'Allemagne, est a la tete du personnel de
l'organisation.

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